Rares sont les hommes qui, dans le temps d’une brève existence, ont renouvelé profondément plusieurs domaines du savoir. C’est le cas du mathématicien Alan Turing (1912-1954), l’un des plus grands penseurs anglais du XXe siècle. Ses idées ont contribué à former le monde actuel, à travers la logique mathématique, l’informatique, l’intelligence artificielle, la modélisation mathématique du vivant, la réflexion philosophique sur des problèmes fondamentaux de la connaissance. Le déroulement de sa vie, entre son enfance malheureuse et sa mort par empoisonnement, en a fait également un personnage de tragédie. Comment cet homme discret, qui aurait pu rester un quasi «inconnu de l’histoire», a-t-il été héroïcisé au point que 2012 a été proclamée International Turing Year?
Ma participation aux commémorations de «l’année Turing» m’a entraîné à «l’historiciser», à comprendre non seulement l’homme qu’il fut mais aussi les représentations qui en ont été élaborées plus tard. Je brosserai rapidement un portrait biographique de Turing, avant de répondre à cette question, tout aussi intéressante, de la construction d’un personnage mythologique contemporain.
Un pythagoricien du XXe siècle
Turing s’est-il jamais demandé s’il était né du mauvais côté de la Manche? Il connaissait bien la France où sa mère l’emmenait régulièrement en vacances – et où son père s’était installé pour des raisons fiscales après son départ de l’Indian Service. Mal à l’aise dans les colleges britanniques qui privilégiaient l’enseignement des humanités classiques et les sports d’équipe, cet individualiste se serait sans doute plus épanoui dans un lycée français où sa passion pour les sciences aurait été mieux appréciée. Et personne ne lui aurait fait de procès pour homosexualité, dans un pays où celle-ci était dépénalisée depuis la Révolution. D’un autre côté, personne parmi les mathématiciens francophones de son époque ne s’intéressait alors à son domaine de prédilection, la logique: son seul interlocuteur possible, Jacques Herbrand, était mort en 1931 dans un accident d’alpinisme; et, quand Turing envoya son article de 1936 à l’Académie des Sciences, celle-ci égara le manuscrit. Ces quelques lignes «d’histoire alternative» servant de prélude, passons en revue les percées scientifiques qui jalonnent la vie de Turing.
Au milieu des années 1930, Alan Turing a trouvé à l’université de Cambridge l’environnement libéral qui lui convenait. L’un de ses professeurs, le mathématicien Max Newman, expose un jour de 1936 la liste de questions fondamentales posées quelques années plus tôt par l’Allemand Hilbert – ces questions forment un véritable programme de recherches destiné à établir les mathématiques sur des fondements logiques rigoureux. Turing est particulièrement intrigué par la question de la «décidabilité»: toutes les questions mathématiques peuvent-elles être «décidées» par un raisonnement formel, fonctionnant comme une machine? Autrement dit, existe-il un algorithme général permettant de démontrer n’importe quel théorème de l’arithmétique? Turing s’attaque au problème d’une façon très originale: sans avoir lu les publications déjà consacrées à ce problème par quelques logiciens, il prend au pied de la lettre la métaphore mécanique. Il imagine une machine très simple capable d’exécuter séquentiellement, selon un programme préétabli, une série d’opérations en vue de résoudre un problème. Cela le conduit à répondre négativement à la question de Hilbert: il n’existe pas d’algorithme général permettant de démontrer tout théorème de l’arithmétique. Ce faisant, le jeune Turing contribue à détruire le rêve scientiste d’une mathématique «complète, cohérente et décidable». Mais, du même coup, il définit précisément ce qui est «calculable» et jette les bases d’une branche nouvelle des mathématiques, l’algorithmique. L’article de cet étudiant de 24 ans, « Sur les nombres calculables et les applications au problème de la décidabilité », est un chef d’œuvre d’intelligence, de maturité, de clarté dans sa construction comme dans sa démonstration, que tout doctorant et tout chercheur devrait lire, quelle que soit sa discipline.
En 1937, cet article n’est lu que par une poignée de mathématiciens intéressés par les fondements logiques de leur discipline. Deux d’entre eux, John von Neumann et Alonzo Church, invitent Turing à préparer une thèse à Princeton. Turing passe donc un an aux États-Unis – ses lettres révèlent à la fois le plaisir qu’il éprouve dans ce grand centre de la science, et le regard savoureusement ironique qu’il porte sur la civilisation yankee. Church, qui a indépendamment répondu à la question de Hilbert d’une manière différente, dirige sa thèse. Là encore, Turing développe cette tournure d’esprit particulière d’un mathématicien qui a du goût pour les machines.
Il rentre en Angleterre en 1938, juste avant que les accords de Munich, livrant la Tchécoslovaquie à Hitler, ne posent des problèmes encore plus graves que ceux de Hilbert. Tout en enseignant à Cambridge, Turing est invité à rejoindre une école «de codage et de chiffre» interarmées (Government Code and Cypher School) où, avec d’autres brillants esprits, son intelligence est mobilisée pour casser les codes allemands utilisés sur la machine Enigma. Cette spécialisation l’amène, en décembre 1939, à rencontrer près de Paris les cryptanalystes polonais et français qui ont mis au point des techniques pour découvrir les clés de chiffrage d’Enigma. Les percées franco-polonaises ont montré que c’est possible, à condition de capturer de temps à autre une Enigma et des documents en clair et codés. À partir de juin 1940, l’empire britannique combat seul face au Reich renforcé des alliances italienne, japonaise et soviétique. Les Allemands perfectionnant régulièrement leur machine en multipliant le nombre de combinaisons possibles pour sécuriser leurs communications, Turing et ses collègues de Bletchley Park doivent travailler nuit et jour au maximum de leurs capacités, afin de comprendre ces innovations et d’inventer rapidement de nouveaux procédés de déchiffrement. Cela passe par la construction de machines électromécaniques permettant d’automatiser la recherche de clés de chiffrage. Les enjeux sont gigantesques: la survie ou la destruction des convois par les sous-marins allemands, la bataille de l’Atlantique, la victoire du nazisme ou des démocraties.
Dirigeant l’équipe chargée d’attaquer le chiffre le plus difficile, celui de la Kriegsmarine qui est la principale menace contre la survie de l’Angleterre, Alan Turing a joué un rôle décisif dans cet affrontement des intelligences. Sur le plan scientifique il a, après les experts polonais, contribué à introduire l’approche mathématique en cryptanalyse. Notons que le film The Imitation Game n’offre qu’une mauvaise caricature de la réalité historique. Loin d’être le savant fou construisant, seul contre tous, un ordinateur au fond d’une grange, Turing était bien intégré à un travail d’équipe. Loin d’être commandé par une sorte de colonel Scrogneugneu autoritaire et borné, Blechtley Park était dirigé par un officier qui sut manager intelligemment des personnalités originales – et plutôt ingérables – pour en faire un collectif efficace. Loin de céder au chantage d’un espion communiste (qui a vraiment travaillé à Bletchley mais n’a jamais rencontré Turing), notre mathématicien libre penseur ne cachait pas plus son homosexualité qu’à Cambridge – et personne ne s’en souciait dans cet environnement élitiste.
En 1943, il est envoyé aux USA pour participer à la coordination des efforts cryptanalytiques et transférer l’expérience anglaise aux Etats-Unis qui lui consacreront des moyens à leur échelle et s’en serviront contre le Japon. Il y retrouve von Neumann, y rencontre Claude Shannon, l’auteur de la théorie mathématique des communications, et s’y intéresse au codage des transmissions téléphoniques, pour lequel il conçoit un nouvel appareil. Rentré à Bletchley Park, il y voit une grande machine électronique, Colossus, entrer en service pour casser un type de chiffre allemand radicalement différent des précédents. Contrairement à la légende, Turing n’est pour rien dans la réalisation de Colossus, mais les possibilités de l’électronique lui ouvrent de vastes horizons.
La guerre finie, Alan Turing passe au National Physical Laboratory. En quelques mois, il y élabore un projet qui est le premier plan détaillé d’un ordinateur. Il n’y fait pas allusion à ses anciens travaux en logique mathématique, mais se réfère au rapport von Neumann de juin 1945 qui définit un calculateur universel à programme enregistré. Toutefois il se heurte à des difficultés administratives et à des objections techniques de la part des ingénieurs du NPL, qui finalement construiront une version réduite, l’ACE Pilot, entrée en fonctionnement en 1950 (on peut voir cette machine au Science Museum de Londres). Turing repart, d’abord pour suivre des cours de biologie à Cambridge.
À la rentrée 1948, il rejoint son ancien professeur Max Newman à l’université de Manchester, où un gros ordinateur est en cours de construction… avec des composants électroniques récupérés de Bletchley Park. Turing y est chargé de concevoir les méthodes de programmation et de les enseigner. Il mène en même temps des recherches sur la vérification de programmes et la théorie de la computation. Il s’intéresse aussi à la formalisation mathématique des phénomènes vivants, intrigué qu’il est depuis longtemps par les correspondances entre certaines formes vivantes et des objets mathématiques comme la suite de Fibonacci. Ses travaux sur la morphogenèse fondent une nouvelle approche en biologie.
Automates électroniques, analogies entre machines et êtres vivants, réflexions sur l’esprit humain, ces préoccupations le rapprochent du courant de pensée cybernétique, qui bouillonne à l’époque à partir des travaux de Norbert Wiener et d’autres chercheurs. Dès 1948, Turing a donné une interview où il jouait avec l’idée d’une machine imitant l’homme, notamment l’intelligence humaine. Deux ans plus tard, dans la revue Mind, il revient sur le sujet et imagine un test, appelé maintenant «test de Turing», censé décider de «l’intelligence» d’une machine. Le principe est pour un ordinateur d’essayer de se faire passer pour un humain à travers un échange textuel quelconque avec un opérateur. Le test est probant si l’opérateur croit avoir affaire à un humain. Notons que, même s’il est peu pertinent de restreindre l’intelligence à une simple conversation, ce test a servi et sert encore d’objectif général pour maints développements en intelligence artificielle.
Inculpé en 1952 d’homosexualité (qui était alors un délit dans la puritaine Angleterre), Alan Turing est contraint de suivre un traitement hormonal castrateur. Pour les policiers comme pour les magistrats, ce n’est qu’un universitaire qui a commis un écart de conduite. Personne, hors du cercle très restreint des anciens des services spéciaux, ne connaît le rôle crucial qu’il a joué à Bletchley Park: les exploits des cryptanalystes resteront totalement secrets jusqu’en 1975. D’ailleurs le contre-espionnage américain, qui domine désormais tous les services occidentaux, a vu trop d’Anglais ayant un profil similaire à celui de Turing (MacLean, Burgess, Philby…) trahir au profit de l’URSS, pour consentir le moindre geste de soutien. En ce sens, Turing est une victime de la guerre froide.
Il meurt deux ans plus tard – suicide ou accident de manipulation chimique, l’énigme reste entière. Ce fait divers n’émeut que ses proches, qui sont peu nombreux. Ce fondateur d’une science nouvelle n’a formé qu’un ou deux doctorants, il n’a créé ni laboratoire, ni revue spécialisée, ni même écrit un livre qui l’aurait «positionné» dans une perspective de carrière institutionnelle qui ne l’a jamais préoccupé. À tous points de vue, ce matérialiste ne s’intéressait qu’à l’esprit.
Du héros méconnu au personnage de légende: la construction du mythe Turing
Les percées scientifiques accomplies par Alan Turing, sa participation aux efforts cryptographiques anglais pendant la guerre et ses explorations intellectuelles ultérieures en font un incontestable héros du XXe siècle. Mais ce héros avait toutes raisons de rester obscur : étudiant spécialisé dans une branche particulièrement absconse des mathématiques pures, disparu ensuite pendant cinq ans dans les services secrets, réapparaissant ensuite comme l’un des experts anglais du calcul électronique et de la cybernétique, c’est un «homme à idées» estimé d’un petit cercle de connaisseurs. Il en agace d’ailleurs, avec le sentiment aigu qu’il a de sa propre intelligence et sa façon de la manifester en écrivant les démonstrations à l’envers au tableau…
N’en faisons pas un rebelle, encore moins un révolutionnaire: universitaire, membre correspondant de la Royal Society, Officer of the British Empire, Alan Turing appartient, jusque dans son style de vie et son originalité d’esprit, à la gentry intellectuelle anglaise. Cet individualiste ne demande au fond qu’une chose: qu’on le laisse vivre et travailler librement. Il ne cherche surtout pas une célébrité ou une position de pouvoir, qui l’entraveraient dans sa quête passionnée de savoir.
Alan Turing et ses travaux théoriques restent donc dans une certaine obscurité pendant les dix années qui suivent sa mort. D’autant que les pionniers de l’informatique sont d’abord accaparés par la construction des ordinateurs, qui pose de redoutables problèmes techniques. Le contraste avec John von Neumann est éclatant: celui-ci avait toute la notoriété voulue pour laisser son nom à l’ordinateur – mathématicien célèbre dès avant la guerre, auteur de rapports bien diffusés qui définissaient la structure des futurs ordinateurs, promoteur de cette nouvelle technologie dans les milieux dirigeants américains.
On peut identifier trois étapes dans la reconnaissance posthume de Turing et sa transformation en personnage historique.
La première a pour acteurs des théoriciens de la programmation. Au milieu des années 1960, les ordinateurs sont devenus beaucoup plus fiables et puissants. Leurs utilisateurs les plus savants éprouvent le besoin de mieux comprendre ce qu’ils font et de trouver des théories sous-jacentes à leurs pratiques. Certains savent que les percées de la logique mathématique des années 1930 répondent précisément à leur quête de formalisation. Celle-ci va de pair avec une revendication militante: le «calcul électronique», technique au service des sciences, doit devenir une discipline scientifique à part entière – computer science, informatique. En 1965, deux informaticiens universitaires, John Carr et Saul Gorn, décident de créer un prix pour couronner d’éminents travaux en informatique, comme il existe des prix en mathématiques ou en physique. Décerné annuellement par l’Association for Computing Machinery américaine, ce prix est nommé en hommage à la mémoire d’Alan Turing. Aux nouvelles générations de chercheurs en informatique, qui n’imaginaient pas nécessairement une personne derrière l’expression Turing machine aperçue dans un cours de théorie des automates, le Turing award fait connaître Turing comme un autre père fondateur de la discipline, après Babbage et von Neumann, voire Zuse en pays germanophones. Mais cela ne touche que le milieu restreint de l’informatique théorique.
Dix ans plus tard, au milieu des années 1970, le gouvernement britannique commence à déclassifier quelques archives sur les accomplissements de Bletchley Park. Cette décision résulte d’un compromis politique délicat: le secret longtemps maintenu sur Ultra, sur les exploits des cryptanalystes, se justifie à la fois par le souci de ne pas entacher la gloire de ceux qui ont combattu en 1940-1945… et parce que le Renseignement anglais a continué à espionner les communications de nombreux pays qui ont récupéré des machines allemandes (Enigma et autres) et les ont utilisées dans les décennies d’après-guerre; mais ces préoccupations s’estompent, tandis que l’informatique devient un phénomène massif dont les USA apparaissent comme le berceau. En révélant des photos de Colossus et les travaux des Codebreakers, la Grande-Bretagne peut revendiquer la co-invention de l’ordinateur. Du même coup, Turing et ses collègues de Bletchley Park apparaissent maintenant aussi comme des acteurs décisifs de la grande histoire, comme des héros du monde libre au même rang que les pilotes de la RAF qui avaient gagné la bataille d’Angleterre.
La troisième étape est plus progressive. Elle commence en 1983 avec la publication de la biographie de Turing par Andrew Hodges, lui-même professeur d’informatique et activiste politique homosexuel. Biographie totale, inspirée à l’origine par une sympathie militante et professionnelle, l’œuvre monumentale de Hodges vise à comprendre en profondeur l’aventure intellectuelle et humaine de son héros dans le contexte mouvant de son époque. Se basant sur ce chef d’œuvre, les biographies, les pièces de théâtre et les films sur Turing se multiplieront ensuite à partir des années 1990. Le personnage sera adopté par les mouvements homosexuels qui feront de Turing une véritable icône gay. Les révélations sur le rôle joué par Turing dans la lutte contre l’Allemagne nazie, puis sa fin tragique liée à son homosexualité, le métamorphosent en un véritable héros romantique dont la notoriété atteint le grand public: le gouvernement britannique ira jusqu’à présenter ses excuses posthumes en 2009 pour la persécution qui aurait conduit Turing au suicide, et la reine accordera le pardon royal en 2013 à ce grand serviteur de la nation. Turing est devenu d’autant plus important depuis la fin du XXe siècle que les progrès des technologies informatique et de l’intelligence artificielle tendent à confirmer ses propositions visionnaires.
Mathématicien surdoué et agent secret efficace, Turing avait tout pour rester inconnu hors d’une petite élite. Ce sont les intérêts scientifiques ultérieurs des informaticiens, puis divers agenda politiques, qui en ont fait a posteriori un grand personnage historique. Couronnement parfaitement mérité: les trompettes de la renommée ne sont pas toujours mal embouchées!
Pierre Mounier-Kuhn
(CNRS et Université de
Paris-Sorbonne)
Bibliographie
• A.M. Turing, «On Computable Numbers, with an Application to the Entscheidungs problem », Proceedings of the London Mathematical Society. 2 42: 230–65. 1937.
• Jean-Yves Girard, La Machine de Turing, Seuil – Points Sciences, 1995 (traduction et commentaires de deux articles majeurs de Turing, celui de 1937 sur les nombres calculables et celui de 1950 sur les ordinateurs et l’intelligence).
• A. Hodges, Alan Turing: The Enigma, London, Vintage, 1983, rééd. 2012. A. Hodges (trad. N. Zimmermann), Alan Turing: L'Enigme de l'intelligence, Payot, 1983, rééd. 2004.
• Jean Lassègue, Turing, Les Belles Lettres, 1998, rééd. 2003.
• Laurent Lemire, Alan Turing: l’homme qui a croqué la pomme, Hachette Littératures, 2004.
• David Leavitt (trad. Julien Ramonet), Alan Turing, l’homme qui inventa l’informatique [The Man Who Knew Too Much; Alan Turing and the invention of the computer], Dunod, 2006 (réimpr. 2007).
• Sinclair McKay, The Secret life of Bletchley Park, Aurum, 2011.
• Hugh Sebag-Montefiore, Enigma, the battle for the code, Phoenix, 2011.
• Michael Smith, The Secrets of Station X, Biteback, 2011.
• Une remarquable histoire en BD de la logique au début du XXe siècle, où apparaissent Turing, Hilbert, Poincaré et bien d’autres : Apostolos Doxiadis, Christos H. Papadimitriou, Annie Di Donna, et al., Logicomix, Magnard-Vuibert, 2011.